Roman de Blandin de Cornouailles et de Guilhot Ardit de Miramar.

Roman de Blandin de Cornouailles et de Guilhot Ardit de Miramar.

Ce petit poëme contient le récit rapide et animé des aventures de deux chevaliers dont les noms lui servent de titre. Le sujet en est simple et le style n' est pas dépourvu d' une certaine naïveté, mais le texte est fort incorrect. Cette imperfection, qui doit évidemment être attribuée au copiste, probablement italien, comme l' orthographe du manuscrit porte à le croire, me permet à peine d' en transcrire quelques vers dans la courte analyse que je me borne à donner de ce roman, dont voici le début:

En nom de Dieu, commenzeray (1: (sic) Lisez comensaray.) 

Un bel dictat, e retrayrai

D' amors e de cavalaria,

E una franca compania,

Que van far dos cavaliers

De Cornoalha, bos guerriers. 

Ces deux chevaliers, Blandin de Cornouailles et Guilhot Ardit de Miramar, vont ensemble chercher aventure; après avoir chevauché deux jours et deux nuits, ils font rencontre d' un petit chien qui semble s' offrir à leur servir de guide; ils le suivent jusqu'à l' entrée d' une caverne; Blandin seul y pénètre, marche quelque temps dans une obscurité profonde, et arrive enfin dans un riche verger où bientôt il s' endort sous un pommier en fleurs:

... Mentre ch' el si dormia 

E reyssidar non si podia,

Aneron venir doas donsellas,

Mot bellas, a gran merveillas.

Dis l' una a l' autra: “Bel cavalier 

Dorm lay desot aquel pomier

Preg o te che l' anem reysidar.”

Ces deux damoiselles l' éveillent en effet, et le supplient de les délivrer d' un géant dont elles sont prisonnières; il y consent, sous la condition de les emmener, s' il est vainqueur, ce qu' elles acceptent. Le chevalier triomphe du géant, et, suivi des deux jeunes captives, il rejoint son ami Guilhot, qu' il a laissé à l' entrée de la caverne. Chacun d' eux en prend une en croupe, et les voilà cheminant tous quatre vers un château qui s' offre à leur vue:

E las donzellas quant viron 

Lo castel, ellas ploreron, 

E planon si mot aygramen

La una e l' autra...

E Blandinet, chi ben amava 

Las donzellas che menava,

Demandet lur de che ploravan.

L' une d' elles lui apprend que ce château est celui de leur famille; qu' il leur a été arraché par un autre géant, frère de celui qu' il a tué, et qui y tient en captivité leurs parents, chevaliers de haut parage:

Respon Blandin: “Ne vos plores, (1: Ne (sic) Lisez no.)

Car lo castel ben cobrares.”

Guilhot réclame l' honneur de les délivrer, et, malgré deux énormes lions, terribles auxiliaires de son adversaire, il est sur le point de terminer heureusement cette aventure, lorsque, tout à coup, surviennent les deux fils du géant, qui le chargent de fers.

Cependant, Blandin ne voyant pas revenir son ami, pénètre dans le château, et attaque hardiment les trois géants; pendant le combat, Guilhot parvient à briser la porte de sa prison, et décide, en faveur de Blandin, la victoire jusqu' alors incertaine; aussitôt ils s' empressent de rendre à la liberté les parents des damoiselles, et les remettent en possession de leurs domaines.

Le lendemain, au point du jour, les deux amis quittent le château. Ils cheminaient en s' entretenant de l' aventure de la veille, lorsque leurs oreilles sont frappées du langage harmonieux d' un bel oiseau qui leur disait: 

“Gentils senhors, annas avant, 

C' atrobares un gran desert,

Intras vos ben apert,

E quant seres jus un bel pin

Che trobares en lo camin,

Laun tenga a la par drecha,

Per una cariera estrecha,

E l' autre tengua a l' autra man;

Aventura trobares mot gran...”

Quant ausiron l' ausel parlar,

So dis Guilhot: “Avez aussit

D' ayssel ausel che nos a dich?” 

Certes, oui, lui répond Blandin émerveillé; et ils s' avancent aussitôt jusqu'au pin indiqué; là, après être convenus de se retrouver au même endroit, le lendemain de la Saint-Martin, les deux chevaliers s' embrassent les larmes aux yeux, et chacun prend la route qu' il a choisie.

Guilhot suit le grand chemin et ne tarde pas à faire rencontre du terrible Lionnet, l' un des géants que Blandin et lui ont déjà vaincus au château; il l' attaque et le tue; mais très affaibli lui-même par les blessures qu' il a reçues dans ce combat, il remonte avec peine sur son destrier, et continue sa route en perdant ses forces avec son sang. Heureusement, il est recueilli par un ermite qui lui prodigue tous ses soins et le guérit en peu de jours. A peine rétabli, il recommence ses courses, tue le frère du chevalier Noir, et est assailli par une troupe de guerriers, dont il reste le prisonnier, malgré la plus vigoureuse résistance.

De son côté, Blandin, apres s' être séparé de son ami, était entré dans un bocage, où il avait rencontré une damoiselle,

Che gardava en un prat

Un chaval blanc, tot ensellat...

E quant Blandin vi la donzella,

Apertamen s' en va vers (1) ella..., (1: (sic) Lisez ves.)

E dis: “Donzella de gran parage,

Com es aisi en tal boscage?

Ai! de qui es tant bel caval?

Preg Dieu que lo garde de mal,

Car, per ma fe, el es mout bel

A cavalcar a tot donzel.” 

Elle lui répond qu'on la nomme la damoiselle d' Outre-mer, qu' elle va cherchant aventure, et que, voulant prendre son repas, elle a lâché son cheval dans la prairie, ajoutant:

“E si dinar am mi vos plaissia,

Per ma fe, gran gauch n' auria.”

Le chevalier accepte l' invitation; ils dînent; après le repas, la belle étrangère l' invite à une promenade dans la prairie; mais à peine a-t-il fait quelques pas, que, forcé de céder à un sommeil irrésistible, il s' assied sous un pin et s' y endort aussitôt. A son réveil, il cherche en vain la damoiselle; elle a disparu avec le destrier de Blandin, lui laissant en échange le cheval qu' elle montait. Le chevalier désappointé, 

Apertament sus va montar; 

E quant el fo y dessus montat, 

En un bel camp el l' a menat,

E aqui el lo asaget, 

E vi che trop ben si portet.

Quoique l' échange ne lui paraisse pas désavantageux, Blandin n' en jure pas moins sur sa tête de n' avoir ni fête ni joie qu' il n' ait retrouvé son destrier et la damoiselle qui le lui a emmené. Il marche trois jours, le quatrième il fait rencontre d' un écuyer qui se lamente; pressé de questions, cet écuyer, nommé Peytavin, lui raconte comment son maître a perdu la vie en voulant tenter de rompre l' enchantement qui tient dans le sommeil une damoiselle de toute beauté dont il était passionnément épris. Blandin prend l' écuyer à son service, et se fait conduire au château où repose la belle endormie, sous la garde de dix chevaliers; il en tue six, reçoit à merci les quatre autres; et, après les avoir enfermés par précaution, il parcourt le château. Mais voyant que toutes ses recherches sont inutiles, il descend dans le jardin, y trouve le frère de la belle enchantée, qui lui dévoile le mystère et le conduit dans une chambre où il la voit étendue sur un lit, entourée de sept damoiselles qui veillent nuit et jour; l' une d' elles est sa sœur:

E quant Blandin vi la donzella, 

Che era moult blancha e mot bella,

Va s' en tan fort enamorar

Che el non saup en se che far.

Il apprend que pour rompre l' enchantement il faut faire la conquête de l' autour blanc, renfermé dans une tour, dont les trois portails sont gardés: le premier par un énorme serpent, le second par un dragon et le dernier par un géant sarrazin, qu'on ne peut faire mourir qu'en lui arrachant une dent.

Blandin tue le serpent, passe à côté du dragon endormi, et, après un long combat, arrache deux dents au Sarrazin; il va prendre ensuite l' autour blanc et revient en le tenant au poing; mais pour sortir il lui faut terrasser le dragon, qui s' est éveillé, et s' oppose à son passage; il le tue, et aussitôt l' enchantement est détruit. Briande, c'est le nom de la belle, ne met point de bornes à sa reconnaissance, mais son libérateur n' aspire qu'à s' en faire aimer et lui offre franchement son cœur, qu' elle accepte, en lui apprenant qu' elle n' est autre que la damoiselle d' Outre-mer qui lui a enlevé son destrier.

Après un séjour d' un mois:

Blandin va penrre comjat

De Brianda e del donzel,

E volc se partir del castel,

Car de Guilhot li recordet.

Grande est la douleur de Briande; mais Blandin a promis à son frère d' armes de le joindre à jour fixe sous le pin où ils se sont séparés, et il ne trahira pas sa promesse. Il part donc, s' engageant à revenir dès qu' il aura retrouvé son ami. 

Par une suite d' heureuses circonstances, Blandin apprend que Guilhot est prisonnier, découvre le lieu de sa captivité, le délivre et retourne avec lui au château de Briande, dont la soeur, qui a nom Irlanda, inspire à Guilhot un amour qu' elle ne tarde pas à partager. Bientôt se conclut un double mariage qui donne lieu, pendant quinze jours, à des joûtes et à des fêtes brillantes. 

Guilhot et Blandin, heureux et satisfaits de leur sort, ne voulurent plus quitter leurs femmes,

Che troberon bonas molers.

Ils renoncèrent aux aventures, et vécurent honorablement en bons chevaliers. 

E pregas Dieu che ayssi vos prenha.

Ce roman, dont le texte est si visiblement altéré, est conservé dans la Bibliothèque royale de Turin; il fait partie d' un petit in-fol. ayant pour titre Miscellanea; il commence à la page 94 du manuscrit, qui, dans l' ancienne distribution, était coté L, III, 5, et se trouve, aujourd'hui, désigné par E, II, 34. Voyez, au sujet de ce poëme: Memorie della reale academia di Torino, tome XXXIII, deuxième partie, page 6.

Roman de Fierabras.

Roman de Fierabras. 


Le sujet de ce roman, qui se compose d' environ 5000 vers, est une des expéditions attribuées à Charlomagne contre les Sarrasins. Comme dans la plupart des romans de chevalerie du cycle carlovingien, on y voit figurer, parmi les guerriers français, le célèbre Roland, Olivier, Oger le Danois, le traître Ganelon, tandis que du côté des Sarrasins, on distingue le héros du poëme, et quelques autres personnages qu'on retrouve aussi dans plusieurs ouvrages du même genre.

Ce poëme est écrit en vers de douze syllabes, et divisé en tirades monorimes, parfois assonantes, de longueur inégale; mais qui, à la différence de celles de la Chronique des Albigeois, n' ont pas de petit vers final.

Il n' en existe qu'un seul manuscrit connu, trouvé en Allemagne, en 1824; par le professeur Lachmann, et qui, dit-on, en 1716, était conservé à Paris dans le Monastère majeur de la congrégation de Saint-Maur, sans doute l' abbaye de Saint-Germain-des-Prés.

En 1826, M. Emmanuel Bekker en donna communication à l' Académie de Berlin, qui l' a inséré tout entier dans ses Mémoires (1: En rendant compte de cette publication dans le Journal des Savants, mars 1831, je me suis fait un plaisir de féliciter M. Bekker sur l' exactitude et l' intelligence qu'il a mises à reproduire ce manuscrit, dont le texte est généralement pur, à quelques incorrections près.); 

il en a même été tiré à part un petit nombre d' exemplaires, mais la difficulté qu'on éprouve à s' en procurer m' a déterminé à extraire quelques fragments de ce poëme, et à les intercaler dans une analyse succincte, qui puisse donner une idée de son ensemble.

Après une sorte d' invocation à Dieu et à la Vierge, et apres avoir rappelé une prétendue destruction de Rome par l' émir Balan, et par son fils Fierabras, l' auteur poursuit ainsi:


Senhor, ar escoutatz, si vos platz, et auiatz

Canso de ver' ystoria; milhor non auziratz,

Que non es ges mesonja, ans es fina vertatz; 

Testimonis en trac avesques et abatz,

Clergues, moynes e pestres e los sans honoratz.

A San Denis, e Fransa, fo lo rolle trobatz;

Et auziretz lo ver, si m' escoutatz en patz,

Ayssi cum Karles Maynes, que tant fo reduptatz,

Fo premiers en Espanha trebalhatz e penatz,

E conquis la corona don Dieus fon coronatz,

E lo digne suzari don fo envolopatz,

E los santes clavels, e 'ls signes honoratz.

A Sant Denis en fo lo trezaurs aportatz,

Et auiatz la razo, ayssi cum es vertatz: 

Karles a sos baros en la ost amenatz; 

Devas per totas partz los a totz asemblatz, 

Que una legua te la ost per totz los latz...


Charlemagne passe son armée en revue, et se dispose à entrer en Espagne:


Els vals, sotz Morimonda, es Karles albergatz;

No y a Frances no sia mot be entalantatz,

E totz aquels que son amb els encompanhatz,

De querre la corona don Dieus fon coronatz,

E lo digne suzari on fo envolopatz.

Mas, si Jesus no 'n pessa, qu' es us e trinitatz,

Ja no sera le jorn de lendema passatz

Que Karles, l' emperayre, n' er dolentz et iratz,

Car us Turc de Maragoyle los a totz espiatz;

Can ilh devo puiar, als Turcxs s' en es anatz.

A Maragoyle s venc lo Turc, totz esfredatz;

Ab sa votz, que ac clara, a los Turcxs escridatz:

“Senher rey d' Alichandre, e com etz enganatz! 

L' emperayre de Fransa es en la terra intratz,

E trastot lo pays er ades degastatz;

En pus de mil partidas es pres et alucatz;

Els vals, sotz Morimonda, es Karles albergatz,

Ab tot aytal barnatge et ab aytans armatz,

Que anc non vi aytans luns hom de mayre natz.”

Can l' enten Ferabras, anc no fon pus iratz

De maltalent et d' ira, eses et abrazatz; (ensés)

Et estrenh fort sas dens, et a 'ls someils levatz;

Lun temps no fon payas aytan fort corrossatz;

Et escridet sos homes: “Mas armas mi portatz,

E vos autres apres mantenent vos armatz.

Per aycel Bafomet, a cuy mi son donatz,

Jamay no finaray c' auray Frances trobatz!”

Ara es Ferabras en un caval montatz; 

Cen melia cavayers en a ab si menatz;

Lo franc caval d' Espanha fo mot gent essenhatz,

Pus de LX homes a mortz et afolatz;

No 'l donaria lo rey per l' aur de X ciutatz.

Costa lo rey cavalgua Brustamon l' almiratz.

Devas Contastinoble s' es lo rey regardatz,

E vic sos castels ars e pres et alucatz.

Ab tant veus un paya qu' es duramen nafratz,

Que sotz l' auberc ne salh lo sanc vermelh, betatz.

Ab sa votz s' es lo Turc autamens escridatz:

“Senher rey d' Alichandre, cum etz dezcretatz!

Pres es Contastinoble, e 'ls murs escrebantatz,

E tota la gent morta, c'us no n' es escapatz,

Mas ieu tant solament que m' en soy gent emblatz.”

Ad aquesta paraula cay del caval plasmatz.

Cant o vic Ferabras, mot ne fo esfredatz...


Fierabras place une partie de ses troupes en embuscade, tandis que le reste marche à la rencontre des Français, qui continuent à s' avancer, et dont l' avant-garde est commandée par Olivier:


Ferabras d' Alichandre fo de mot gran fertat;

Sa terra vic mal meza, e son pays gastat:

D' ira que ac lo rey ac lo cor trasuzat.

Lo rey salh del vergier sus son destrier comat;

LX melia Turcxs s' en son ab luy anat,

E n' ac L melia ins el bruelh amagat;

Et al rey de Milogre son trastuh comandat.

Ferabras d' Alichandre a un pueg davalat.

La batalha auran, no sera trop tarzat.

Olivier, lo gentil, a mot ben espleytat 

C'ab VII melia baros a la val trespassat.

Lo castel era fortz e mot ben ayzinat,

E d' omes e de bestias era ple e tancat.

Sarrazis lay avia qu' ero de gran fertat,

E de mot gran riqueza eron resaziat.

Olivier, ab los sieus, lay so per so intrat;

No troban Sarrazi no l' aian crebantat.

Descofit son paya, et a mort tuh lieurat.

Del aver que y trobero son cargat e trossat,

E salhon de la vila ab so que an trobat.

Mas, si Jesus no 'n pessa, tost lor sera cambiat,

Qu'els payas de la terra se son tuh ajustat;

Be son LX melia, tuh garnit et armat.

A caval et a pe corro cum forsenat;

Porton arcxs e sagetas e cayrels enpenat

E grans espazas corbas de bon acier temprat;

Al destreg d' un passatge an los Francxs encontrat.

Can Frances los perceubro, mot en son esfredat.

Frances e Sarrazi si son etrescridat.

No y a mas del ferir, tan si son aprosmat.

Lay ac mant colp de lansa e d' espaza donat,

E mant escut fendut e mant ausberc falsat.

Olivier los abat cum hom fay am faus blat;

Pus menut los trabuca que no plou en estat.

Mas us paya lay venc que porta un matrat; 

Non passaran li nostre tro n' aia mant tuat.

Olivier venc punhen sul bausa abrivat; 

E can vic cel diable, qu' es de la gran fertat,

Brandis la bona lansa et a 'l caval virat,

E venc vas lo paya de tan gran volontat

Que detras las espallas li a lo fer passat,

E 'l paya chay a terra, costa 'l pas abauzat; 

Pus de VII C Frances li son desus passat,

Ab los pes dels cavals l' an tot enbudelat. (esbudellat, desbudellat)

Can la payana gen viro que mort los hi abat,

La batalha grupiro, fugen s' en son tornat;

Per puegs e per montanhas s' en van desbaratat.

Olivier fer e broca l' alferan de bon grat;

El punh tenc Autaclara am pom d' aur nielat;

Cel cuy cossiec a colp, mot a pauc de santat.

Dels morts e dels nafratz roman tot enjoncat,

Que de L melia no s' en son XX tornat.

Pero so que portero no an ges oblidat;

Tot an pres e cargat, e y son encaminat.

Mas car o compraran ans que si' avesprat,

Que anc no feyron preza don fossen pus irat...


Cette affaire est à peine terminée, que l' avant-garde se voit tout à coup assaillie par de nouvelles troupes payennes, auxquelles se joignent celles qui s' étaient embusquées. Le combat est long et douteux, mais il se décide enfin en faveur des Français par l' arrivée de Charlemagne, qui délivre Olivier atteint de plusieurs blessures: 


L' emperayre de Fransa es als traps repayratz,

Et el e siey baro an lors cors desarmatz.

Karles fo mol dolens d' Olivier qu' es nafratz.

Lo filh Raynier de Gennes dissendet mot nafratz; 

Del sanc que a perdut li fo sos vis mudatz.

Lo payre lo dezarma, per qui fo mot amatz;

Entorn le cor li ieys lo sanc vermelh, betatz.

Lo duc Raynier de Gennes a V metges mandatz.

Olivier an lavat per flancxs e per costatz;

Pueys li cercan lo cors enviro per totz latz;

Los budels troban sas, no'ls a entamenatz:

Mas lo veri trobero del fer enverinatz.

Lo coms no s pot sufrir, ab tant el s' es colcatz;

No pot vezer son payre, ab tant s' en es anatz.

Per lo comt' Olivier es lo rey mot iratz.

Dels joves cavayers es gran esquern levatz,

E ditz que mays no 'ls preza dos deniers monedatz:

Mot valo mays los vielhs que los joves assatz.

Can Rollans l' entendet, el n' es mot corrossatz,

Si c'a per pauc no ditz al rey: “Vos hi mentatz.”

Ad una part si tray totz d' ira alumnatz.

Ab aquestas paraulas lo rey s' en es intratz.

Senhors, auiatz bo sen, si 'ntendre 'l voliatz; 

La chanso es ben fayta; melhor no l' auziratz.

Ferabras d' Alichandre fon dolens et iratz;

Areyre s' en repayra, sos Turcxs a encontratz; 

Can el los vic venir ayssi desbaratatz,

Am sa votz, que ac clara, s' es en aut escridatz:

“Baro, ditz el, qui us a ayssi desbaratatz?”

- “Per Bafomet, bel senher, Karles e sos barnatz.

Morts lay es Esclamar, jamay no lo veyratz,

E Tenas de Nubia e lo rey Tribuatz,

Que de L melia non a X escapatz.”

Aqui jagro la nueyt tro 'l jorn fo esclayratz.

Endreyt l' alba del jorn, can parec la clartatz,

Ferabras apelet Brullan de Monmiratz

E lo rey Moredas e dels autres assatz:

“Baro, ditz Ferabras, ayssi dreyt m' esperatz,

Qu'entro sus que ieu torn, d' ayssi no vos partatz;

Car, per aycel Bafom, a cui mi soy donatz,

Jamay no finaray c' auray Frances trobatz;

E s' ieu no vengi m' anta, mot ne seray iratz.”

Et els an respondut: “Si com vos comandatz.”

Ferabras part d' aqui, sos homes a laychatz.

Lo bon caval d' Espanha li venc totz esselatz,

Et el no y punhet gayre, que tost es sus puiatz.

Marimonda traspassa, don li mons son ramatz:

Jamay no finara Frances aura trobatz...


L' empereur, au milieu de ses chevaliers, se plaint de l' imprudence d' Olivier, qui a été sur le point de perdre l' armée en se laissant surprendre. Tandis qu' il parle,


L' emperayre de Fransa s' es pres a regardar,

E vic lo Sarrazi en l' engarda montar.

Jamays de pus ric home non auziretz parlar.

De las tors de Palerna si fay senhor clamar,

E si anet per forsa en Roma guerreyar,

E tuh cels de la terra fetz asi renegar.

E car las gens no y s volgro am luy senhoreyar,

El fetz destruire Roma e 'ls monestiers gastar.

Mortz lay fo l' apostoli, li legat, e li bar.

Si 'nportet la corona que tant fay ad amar,

E 'l signe e 'ls clavels don si fetz clavelar,

E 'nportet lo enguen don Dieus si fetz onchar,

E 'l ver sante suzari don si fe 'nvolopar.

Ferabras d' Alichandre se fazia clamar.


Fierabras s' approche du camp des chrétiens, et défie lui-même les plus vaillants chevaliers de Charlemagne:


Lo Sarrazi dissen desotz l' albre fulhat;

De las armas que porta a son cors desarmat;

Al caval tol lo fre, laycha l' anar pel prat.

Ab sa votz, que ac clara, autamens a cridat:

“On iest Karles de Fransa? mot t' auray apelat;

Envia m' e l' engarda Olivier, ton privat,

O Rollan to nebot ab lo cor abdurat...

Si 'n trametetz dels autres, dels milhors del barnat,

E sian III o IIII, no seran refudat.”

E can l' entendet Karles, si a son cap crollat.

Richart de Normandia a lo rey apelat:

“Senher duc, ditz lo rey, ja no m sia celat:

Conoychetz vos cest Turc que tant aura cridat?” 

- “Senher, so ditz Richart, ieu vo 'n diray vertat:

So es lo pus ric home don oncas fos parlat,

No nasquet Sarrazi de la sua fertat:

No preza rey ni comte un denier monedat.”

Can Karles l' entendet, si a son cap crollat.

L' emperayre de Fransa es fortmen esmayatz,

Et apela Rollan: “Bel neps, car no y anatz?”

- “Senher, so ditz Rollans, e per que m' en parlatz?

Que per aycel Senhor que Dieus es apelatz,

Car mays amaria esser ades totz desmembratz,

Que ieu prezes mas armas, ni que lay fos anatz;

Ier, can payas nos vengro al destreyt dels fossatz,

L melia foro, lors vertz elmes lassatz,

Manh gran colp lay donem e 'n receubem assatz;

Olivier, mon companh, lai fo greumen nafratz,

Can vos nos securetz am vos riche barnatz,

E payas s' en fugiron, lors fres abandonnatz;

E can fom a las lotjas et als traps retornatz,

E vos prezetz a dir, per qu' ieu soy mot iratz,

Que los viels feyron miels que li jove assatz.

E, per l' arma mon payre, non es hom vieus ni natz,

Que sia de ma companha, que, s' el lay fos anatz,

Que ja fos may per mi sostengutz ni amatz.”

- “A, glot! ditz l' emperayre, cum iest desmesuratz!”

Karles tenc son gan destre, que fo ab aur obratz,

E feric ne Rollan en travers, per lo natz,

Qu'apres lo cop n' ichic lo sang vermelh, betatz,

Rollans a mes la ma al bran que ac al latz;

Ja ferira son oncle si no s fos perpesatz.

“Ay Dieus! so a dit Karles, e cum soy vergonhatz!

Car cel mi vol aucire que mos neps es clamatz!

Davas totz homes degra per luy esser amatz.

Ja Dombre Dieu no plassa, qu'en la crotz fo levatz,

Que el puesca tant vieure qu' el jorn sia passatz.”

Et escrida: “Frances, ara tost lo m liatz,

Jamays no cug manjar tro sia desmembratz.”

Can Frances l' entendero, totz foro esmayatz;

Non lay n' ac tan arditz c'avan sia anatz.

Lo rey ab sos baros si s' es pres a parlar:

“Ay Dieus! so a dih Karles, que tot as a jutjar,

Ieu no say qui m' azir ni qui m deia amar;

Qu' ieu vey que cel mi falh que m degra ajudar.”

- “Senher, ditz lo duc N Aymes, aysso laychatz estar:

Enans m' enviasetz al Sarrazi justar.”

- “No say, so ditz lo rey, qui m puesca enviar.”

Ar enclina son cap, e pren si a pensar.

Olivier jatz nafratz, lo gentil e lo bar,

Us messatge li venc las novelas cumtar,

Coma Rollans si volc ab son oncle mesclar.

Olivier n' ac tal dol, de sen cuida raviar,

Al pus tost que el poc si comens' a levar.

Can lo coms fo en pes, sos flancxs pres a gardar;

De son blizaut de seda fes un pan esquinsar,

Pueys s' en fay totz sos flancxs isnelamen bendar,

E apelet Guari que vic latz si estar:

“Vay, si mi fay mas armas sus ayssi aportar,

Montarey e l' engarda, al Sarrazi justar.”

- “Per Dieu, senher, no sia, so ditz Guari lo bar;

Vos vos voletz aucire e vos eys afolar,

Si vos prendetz las armas, Dieus pens del retornar.”

- “Vassal, ditz Olivier, tot so laichatz estar,

Luns hom no s deu tarzar de son pretz ichausar,

Car ieu lo dreyt de Karle vuelh tos temps razonar,

E no li faliray tant cum puesca durar, 

Pus ieu vey los Frances ayssi espaventar.

A la cocha pot hom son amic esprovar.

Vay, aporta m mas armas; no puesc pus demorar.”

- “Senher, so ditz Guari, aysso m' es mal per far;

Mot dolens o faray, pus non o puesc vedar.”

Sas armas li portet ses pus de demorar,

Et Olivier s' armet, cuy que deya pezar.

Lo filh Raynier de Gennes mot ricament s' armet;

Guari, sos escudiers, sas causas li causet;

Et apres del armar, son auberc li lasset.

Lo coms seys Autaclara, que mot fortmen amet; 

Lo blanc caval d' Espanha Guari li amenet.

Can Olivier lo vic, de sa ma lo senhet.

Lo coms pres lo destrier, sus lo dos li montet,

Per la cinta de seda l' escut al col pauzet;

Pueys a pres son espieut que Guari li baylet.

Lo filh Raynier de Gennes als estrieups s' afiquet

Per ayssi gran vertut que los estrieups pleguet.

Lo filh Raynier de Gennes el caval es montatz,

Et a cinta s' espaza al senestre costatz.

L' escut ac a son col, el cap l' elme gemat.

El a senhat son cors, a Dieu s' es comandatz.

Comjat pres de Guari, ab tant s' en es anatz; 

Entro al trap de Karle no s' es pas arestatz.

Lai trobet lo duc N Aymes e l' estout Guilamatz,

E dels baros de Fransa e dels princeps asatz.

Lo coms Rollan lay fo corrosos et iratz;

Mas mot fort si penet, car si fo paleyatz

Am Karle, lo sieu oncle, que tant era onratz;

Ar feyra la batalha volontiers, so sapjatz.

Trop s' es tarzatz lo ducxs, e tart s' es perpensatz

C' Olivier la fara, qui qu'en sia iratz.

Ab tan vecvos lo comte que venc totz abrivatz;

Entro al trap de Karle no s' es pas restancatz,

E, lay on a vist Karle, el s' es enrazonatz:

Emperayre de Fransa, senher de grans bontatz,

Ja a pus de III ans e complitz e passatz

Qu' ieu prezi companhia ab Rollan, lo lauzatz,

Pueis non agui del vostre dos deniers monedatz,

Mas ara us prec que m sia gazardo aquitatz.”

- “Volontiers, ditz lo rey, per mon grinho barbatz,

Aytan tost cum serem en Fransa retornatz,

Ja no m queriretz de que no us sia donatz,

De borcxs ni de castels ni de ricas ciutatz.”

- “Senher, ditz Oliviers, no us deman als, si us platz,

Mas que m detz la batalha d' aycel desbateyatz...” 

- “Olivier, so ditz Karles, as to sen cambiat,

Qu' enqueras de tas playas no t'a luns hom sanat; 

Vay, bels amicxs, areyre, repausa t'en ton trap...

No t'i laychari' anar per l' aur d' una ciutat.”

Ab tan si dress' en pes Gaynelo et Aldrat;

Cel Senhor los cofonda que lo mon a creat!

No triguet pueys dos ans, so ditz hom per vertat,

Que trahiro los Pars, li fals trachor proat,

Don els duy pueys moriro a dol et a viltat.

“Senher, so a dit Gaynes, enquers non ay parlat;

Vos nos avetz e Fransa un jutjament donat:

Que so que los duy auian deu esser autreyat,

Sitit no y es lo ters, per so no er passat;

Nos jutjam d' Olivier: per dreyt es acordat

Qu' el fassa la batalha ab lo desbateyat.”

Can lo rey los enten, tot lo sen a mudat;

Per mot fer talen mal a Gaynes esgardat:

“Gayne, so a dit Karles, Dieus ti donc mal fat,

E cels de ton litnage sian deseretat,

Car per ta culvertia as Olivier jutjat;

Et ieu vuelh qu' el lay an, ja no er trastornat;

Mas per aycel Senhor, qu' es Dieus e trinitat,

Que si 'l es mortz o pres, tu sapjas per vertat

Que ieu ti faray pendre coma layro proat,

E trastuh tiey paren seran deseretat.”

- “Senher, ditz Gaynelo, Dieus ne gar mon barnat!”

Pueys ditz entre sas dens cuendamens a celat:

“Ja Dombre Dieu no plassa, lo rey de majestat,

Que jamay el ne torn' a tota sa etat...”

- “Olivier, ditz lo rey, Dieus, per sa pietat,

Ti sia en ajuda del paya desfezat.”


Olivier part pour combattre Fierabras; celui-ci a trois épées, Baptisme, Graman et Florence, et de plus il porte, suspendus aux arçons de sa selle, deux petits barils remplis du baume qui avait servi à oindre Jésus-Christ; tout homme blessé est guéri dès l' instant qu' il peut en boire. Après quelques pourparlers, le guerrier Maure, qui d' abord ne voulait pas se mesurer avec Olivier parce qu' il l' avait reconnu blessé, lui propose généreusement de boire du précieux baume; le guerrier chrétien refuse. Le combat s' engage; Olivier, affaibli par les blessures de la veille, éprouve d' abord du désavantage; mais du même coup d' épée ayant renversé Fierabras et tranché la courroie qui attache les barils, il s' en empare, boit, guérit soudain, et les jette à la mer. Dès ce moment la partie devient plus égale:


Ferabras d' Alichandre a son colp azesmat,

E feric Olivier un colp desmezurat,

C'un cartier de la cofa li abatet el prat,

E dels cabels del cap li a un pauc ostat:

Dami Dieu lo gueric que ges no l' a plagat.

El comte feric luy...

Et albiret son colp et a 'l ben azesmat.

So que tenc del escut, a denant si levat;

Si aut a Ferabras amont son bran levat, 

Que tot si descubric lo flanc e lo costat.

Olivier lo perceup, et a 'l ben avizat;

Al retrayre lo fier de son bran aceyrat,

Per desotz la mamela li a un colp donat.

E lo coms s' afiquet, c'avia lo cor irat;

Pres d' un palm de la carn li a l' acier trencat,

C'a per pauc los budels no son defors sautat;

Mas anc no y a budel malmes ni 'ntamenat.

Lo sanc de gran rabey ne chay e mieg lo prat.

Auiatz de Ferabras cum fo de gran fertat:

Anc sol no s denhet planher, tan ac de segurtat;

Contramon vas lo cel a ades esgardat:

De Jesu-Crist li membra, lo rey de majestat;

Del ver Sant Esperit l' ac Dieus enluminat.

Olivier apelet, merce li a clamat.

Gentils hom, no m' aucias per la tua bontat;

E si m mena a Karle, lo bon rey coronat,

Qu' ieu vos promet, bel senher, e us jur per liautat

Que ieu tenray la fe de la crestiantat,

E us rendray la corona e 'l signe honorat

E las dignas relequias, don ay lo cor irat

Per so car ieu las prezi, caytiu, malahurat:

C'aysso m' en es vengut, so say de veritat.

Oliviers, gentil Senher, ayas mi pietat:

Car s' ieu muer sarrazi, enquers t'er reproat.”


Au moment où Fierabras se convertit, une troupe de Sarrasins débusque d' un bois, et s' empare d' Olivier et de quelques autres chevaliers, qu' ils emmènent et livrent à Balan, malgré les efforts des Français accourus à leur secours. Ils sont enfermés dans une tour obscure, où ils périraient si Floripar, sœur du guerrier Maure, ne venait à leur aide:


Ab tan veus Floripar, la filha l' almirat;

Anc pus gentil donzela no vic lunh home nat;

De la sua faytura vos diray veritat:

Ac lo cors bel e dreyt e ben afaysonat; 

La carn avia pus blanca qu' evori reparat,

E la cara vermelha cum roza en estat,

E la boca petita, e tenc las dens serrat,

Qu'ela avia pus blancas que neu can a gelat; 

E cenh una correya de seda de baudrat;

La finela fon rica de fin aur emerat.

Ja luns hom que la cinte non aura 'l pel mesclat,

Ni ja de lunh veri non er enpoyzonat,

E si avia III jorns o IIII dejunat,

Si auria el son cors del tot resaziat;

La donzela avia Olivier escoutat;

De la cambra salic, e davala 'l degrat;

Ab lieys XV pieuzelas, de mot gran parentat,

Vengudas son al loc on payas son irat.

“Digatz, c'avetz vos autres? e no m sia celat.”

- “Dona, pres es vos frayre, Ferabras lo lauzat!” 

Ab tan foron li dol del tot renovelat...

Floripar autz la crida que meneron li bar

Que eron en la carcer lo payre Ferabras.

Lo carcerier apela, e vay li demandar:

“D'on so li cavayer que aug lay gaymentar?”

Respon lo carcerier: “Be us o volray comtar,

Dona, ilh son de Fransa, segon que aug gabar.

Homes son del rey Karle que no devetz amar,

Emperador de Fransa que el si fay nomnar;

Cilh so que ajudero vostre frayre nafrar.

Un n' i a entr' els autres que fay fort a lauzar:

Luns hom no vic de carn pus format bacalar.

Cel conquis Ferabras a batalha, so m par.”

- “Brustamon, dis la bela, fay mi ab lor parlar...”

- “Dona, dis Brustamon, vos no y podetz parlar,

L' almiran vostre payre m' o a fayt afizar...”

Mas Floripar trames un ciri alumnar;

Ela venc a la carcer, si la fetz desfermar;

Son cap a mes dedins, e si s pres a gardar:

Un ciri tenc davant que fort reluzic clar;

Los Frances que lay foro comenset apelar:

“Senhors, d' on etz vos autres? no m' o vulhatz celar.”

Et els li respondero: “Be us o volrem comtar:

Nos em, dona, de Fransa, dis Olivier lo bar,

Et em home de Karle, que tant fay a lauzar.

L' almiran nos a faytz en esta tor sarrar

Et al fons de sa jus, e no y podem durar:

Dami Dieu nos ajut, que ns a totz a jutjar.

Dona, si a vos play, faytz nos dar a manjar.”

So respon Floripar: “Vos sabetz ben parlar,

Mas a totz covenra e plevir e jurar

Que vos faretz tot so qu' ie us volray demandar,

E d' aysso m' aydaretz qu' ieu vos volray preyar.”

- “Certas, dis Olivier, be us volem fiansar

Que ja no us falirem per nos membres trencar.

E si podem la sus als Sarrazis montar,

E que nos donetz armas que nos puscam portar,

Nos farem a L las testas trabucar.”

- “Vassal, dis Floripar, en fol vos aug gabar,

E val may bon calar que no fay fol parlar.”

- “Dona, so dis Berart, cel que sap ben cantar,

Nota mot volontiers per so mal oblidar.”

- “Per Bafom, dis la bela, be us sabetz razonar.

Ieu no say qui vos etz, ni no us puesc adesmar;

Mas ieu cug c'am piuzela sabriatz vos jogar.”

So dis Guilhot l' escot: “Be sabetz devinar.”

So respon Floripar: “Ben er a esprovar.”


Cependant Charlemagne charge Roland et six autres pairs de se rendre auprès de l' émir pour le sommer de se faire chrétien, et de lui remettre la sainte croix et les autres reliques qu' il a en sa possession. De son côté, Balan adresse à cet empereur quinze rois sarrasins pour lui proposer de se faire mahométan, et de lui rendre son fils. Les deux ambassades se rencontrent et se livrent combat; tous les Sarrasins sont tués à l' exception d' un seul, qui revient en toute hâte raconter la fatale aventure à l' émir. Bientôt après Roland et les pairs s' acquittent de leur mission; ils courent les plus grands dangers, et sont sur le point d' être mis à mort, lorsque Floripar s' en empare, et les conduit dans son palais, où ils retrouvent les chevaliers qu' elle y tenait enfermés, en attendant le moment de leur délivrance.


Can nostre baro foro en la cambra intrat,

Rollan vic Olivier e si l' a enbrassat;

E si s feyro li autre, que be lor venc en grat...

“Senhors, dis Floripar, a mi vuelh qu' entendatz:

Ieu vuelh que tuh ensemble vostra fe m pleviatz,

Que faretz so qu' ieu vuelha, ses totas falsetatz.”

- “Volontiers, dizon tuh: veyam que demandatz?”

Floripar abraset Richar de Normandia.

“E cum avetz vos nom? no m' o celetz vos mia.”

- “Dona, so ditz Richart, no us o celaray mia:

Hom m' apela Richart; natz suy e Normandia...”

Floripar pres Rollan per lo notz del baudratz:

“E cum avetz vos nom, franc cavayer membratz?”

- “Dona, so dis Rollan, mos nom no us er celatz:

Hom m' apela Rollan, can soy per dreyt nomnatz,

E soy nebotz de Karle, e suy de sa sor natz...”

- “Senhors, dis Floripar, tuh m' avetz afizatz...

Ie us deman per marit un cavayer onratz,

Gui a nom de Bergonha, car fort es bels armatz.”

- “Pieuzela, dis Rollan, a vostras volontatz;

Non a entr'el e vos IIII pes mezuratz.”

- “Senhors, dis Floripar, ara doncxs lo m fermatz.”

- “Venetz avan, Don Gui; la molher vos fermatz.”

- “Senhors, dis En Guio, ja vos non o vulhatz,

Que ja ferme molher, ni sia molheratz,

Si Karle no la m ferma, lo bon rey coronatz.”

Can l' enten Floripar, tot lo sanc li 's mudatz,

E jura Bafomet: “Si vos no m' i fermatz,

Ieu vos faray totz pendre, o seretz desmembratz.”

- “Cozi, so dis Rollan, faytz nostras volontatz.” 

- “Senher, so dis En Gui, ayssi cum vos vulhatz...”

- “Ay Dieu! dis Floripar, tu 'n sias honoratz;

Ar ay la re del monde que pus avia amat,

E faray mi per luy bateyar de bon grat,

E creyray Jesu Crist, lo rey de majestat.”

Lo bras li met sul col, si l' a fort abrassat;

Mas no l' auza bayzar, car no n' a comjat,

Per so car es payana, que be 'lh vengra a grat.


Les Sarrasins découvrent ce qui se passe, et essaient vainement de se rendre maîtres des Français, qui se fortifient dans une tour avec Floripar, dont la ceinture a la vertu de leur procurer tous les aliments qui leur sont nécessaires. Un enchanteur est chargé de dérober cette ceinture. Il parvient à s' en rendre possesseur pendant le sommeil de la princesse, mais frappé des charmes de Floripar, il ose aspirer à un succès plus coupable et plus séduisant; soudain elle s' éveille, s' écrie; on accourt; l' enchanteur est mis à mort, et jeté à la mer avec la ceinture. Floripar s' aperçoit trop tard de ce malheur. De leur côté, ne voyant pas revenir l' enchanteur, et pressentant le sort qu' il a éprouvé, les 

Sarrasins tentent inutilement un assaut; mais bientôt après les vivres manquent aux chevaliers.


Falitz lor es lo vis, la carn e 'l pa e 'l blatz.

Las pieuzelas an fam, ab gen cors honoratz.

Floripar s' espalmet, que tan a grans beutatz;

Gui l' anet redressar, sos novels maridatz...

“Baro, so dis le comte, prec vos que m' entendatz:

Paya nos an sains en estz murs esserratz... 

Iscam nos en defors, los aubercxs endossatz,

E cercarem vitalha ab los brans aceyratz;

Mays am morir defors que dins vieure famatz!”

E Frances respondero: “Tot so es veritatz...” 

Tost et irnelamen an lors escutz cobratz,

E portan lors espazas als senestres costatz;

Venguh son als estables, lors cavals an trobatz; 

Li comte i montero, als estrieups son ficatz,

E pueys van a la porta, lo pont es davalatz...

Li comte cavalguero encontraval los pratz,

E Turc e Sarrazi lay foren ajustatz.

E l' almiran Balan s' es aval regardatz,

Et a vistz nostres comtes suls destriers sojornatz,

L' almiran apelet Brullan de Monmiratz,

Sortibran de Coimbres e dels autres asatz.

“Baro, dis l' almiran, quinh cosselh mi donatz?

Lay cavalgan Frances, lors golfaynos levatz,

E s' am vida n' escapan, mot en seray iratz,

Car aquels son li comte qu' estan dins enserratz.”

Can payas l' entendero, mot si son tost armatz;

E Frances s' eslaychero, lors fres abandonatz;

Dels esperos donavo als destriers sojornatz.

Rollan crida: “Monjoya! baro, ara lor datz!”

Ab son espieut trencan el n' a X trabucatz.

Cascus de nostres comtes si s' es ben esprovatz.

Ab tan veus Clarion ab XX melia armatz;

Neps era l' almiran, e de sa seror natz...

Mot fo sobriers l' estorn dels cavayers membratz;

Mas payas son cregutz, los malvatz renegatz...

E Frances s' en repayro belamens per los pratz;

Aventura lor venc, Dieus en sia lauzatz!

Al repayrar qu' els feyro, an XX saumiers trobatz,

Que de vi que de blat e de carn son cargatz.


Ils s' en emparent; mais, assaillis de toutes parts, ils sont forcés de les abandonner. Olivier, cependant, parvient à se rendre maître de quelques provisions. Par malheur, l' un d' eux est tué, et Gui de Bourgogne est fait prisonnier. Le lendemain, les Sarrasins se disposent à le pendre, mais Roland, qui s' est aperçu de leur mouvement, marche à son secours avec ses compagnons, et le délivre:


Entro sus a las forcas Rollan no s' es restatz;

A 'N Guio de Bergonha sos huelhs a desbendatz,

E lo liam trenquet ab que fora pengatz...

Lo caval li menet que fo del renegat,

E cridet a 'N Guio: “Cozi, ara montatz.” 

Rollan dis a 'N Guio: “Prop de mi cavalgatz

Tant entro que agam armas don siatz armatz.”

- “Bel senher, dis En Gui, si cum vos comandatz...”

Lay comensa l' estorn; ja maior non veyratz...

Rollan fier un paya que ac nom Falsabratz,

E donet li tal colp qu'el cap es lay sautatz;

E Rollan a cridat: “Cozi, ar vos armatz;

Veus aychi belas armas; tantost vos adobatz.”

Domentre qu' En Gui s' arma, es pels autres gardatz:

De Rollan e dels autres es totz environatz.

Lo coms salh sul caval, can fo aparelhatz,

Et es de plana terra sus la sela montatz.

Als comtes escridet: “Senhors, ara lor datz,

Car mostrarai a Turcxs cum lor sui escapatz...”

Pres d' una balestada an payas reculatz.

Trops n' i ac de batutz e mortz e de nafratz.

Mas Sarrazi si arman a lotjas et a traps,

De XX melia payas es l' asaut refrescat.


Après des efforts inouïs, ils parviennent non seulement à se débarrasser de tous ces assaillants, mais encore ils s' emparent d' un convoi de vivres qu' ils amènent heureusement dans la tour. Chemin faisant, ils rencontrent et emportent avec eux le corps de celui qui avait été tué la veille. Dès qu' ils se voient des subsistances assurées pour deux mois, ils cherchent à faire connaître leur position à l' empereur. Richard de Normandie est chargé du message, et afin qu' il puisse s' éloigner sans que les Sarrasins le voient, les chevaliers font une sortie:


E can Richart los vic ab los payas mesclatz

Part si de lor pluran, et es encaminatz.

Per mieg los traps de l' ost s' en es mot tost passatz...

E Frances s' en repayro entro sus als valatz;

Per fors' an Sarrazis areyre reculatz.

Intran s' en en la tor e le pont es levatz,

Pueys van a las fenestras dels palaytz dentelhatz;

Viro lo duc Richart c'a totz los Turcxs pasatz.


Mais il est aperçu et poursuivi. Bientôt même son cheval s' abat sous lui, et il est atteint. Le premier Sarrasin qui se présente est le roi Clarion, qu' il a le bonheur de tuer; son destrier lui fournit le moyen d' échapper à la troupe qui suivait ce Roi. Ici une circonstance que l' art du poète a su ménager, augmente considérablement l' embarras des chevaliers restés avec Floripar. Le cheval de Richart s' est relevé, et, malgré tous les efforts des Sarrasins, il est parvenu à regagner la tour. En le revoyant les chevaliers ne doutent pas de la mort de Richard, et déplorent sa perte tandis qu' il se dirige tranquillement vers l' empereur. Cependant Balan, qui voudrait venger la mort de son neveu Clarion, expédie un messager à Golafre, chargé de garder le pont de Martiple par où doit passer Richard. Le messager le devance, et tout est disposé pour l' arrêter, lorsqu'un miracle, opéré en sa faveur, le délivre de tout danger. Mais pendant qu' il se hâte de se rendre auprès de l' empereur, Ganelon et les siens tentent, avec succès, de jeter le découragement dans tous les cœurs, et font si bien, qu' ils décident Charles, désolé, à lever le camp et à retourner en France.


Ara s' en vay la ost per un gran deruben;

E Karles regardet, e devas orien

Richart de Normandia vic venir fort punhen.

Fetz restancar la ost, que non ane avan...

Ab tant vecvos Richart que ac lo cor valhan,

Denant l' emperador dichen del alferan.

Lo rey lo saludet e vay li demandan:

“Digatz, per amor Dieu, c'avetz fayt de Rollan

Ni dels autres baros?...”

- “En Agremonia so, en una tor mot gran,

E teno 'ls asetgat CCC melia payan...”

Can Karles entendet Richart de Normandia,

No fora pus jauzens per tot l' aur de Syria;

E jura San Denis, cuy adora e pria,

Que Gaynes e 'l sieu son ple de gran bauzia...

Als vals sotz Marimonda es la ost arestada.

Lendema, gran mtli, can l' alba fo crebada,

Comandet le rey Karles sa gen que fos armada.

Doncxs s' armero Frances, ses lunha demorada...

Richart de Normandia ab la cara membrada

Donet lo caval negre, ab la sela daurada,

Al duc Raynier de Gennes ses lunha recobrada;

E pueys a belamen sa gent adordenada;

A for de mercadiers l' a mot ben arrezada.

Cascus portet son bran sotz sa capa fiblada.

V cen cavayers foro de bona gent armada,

Lors saumiers aculhiro, van s' en per mieg la prada.

Richart anet premiers, car be sap l' encontrada.

Anc entro a Martiple no y ac regna tirada.

Karle s' i embosquet pres d' una balestada

Ab sa rica companha, que menet ben armada.


Sous leur déguisement ils essayent de passer le pont que Golafre fait relever au moment où quatre d' entre eux venaient de le traverser. Et comme il veut les punir de tant d' audace, ils le tuent et ouvrent passage à toute l' armée; apres un long combat, pendant lequel il est quelque temps prisonnier, Charlemagne finit par s' emparer de la ville, grâces surtout à la valeur de Fierabras, désormais dévoué à l' empereur. L' émir en apprenant la nouvelle du succès des Français, entre en fureur contre ses Dieux:


E venc tost e corren a la bafomayria;

Tal ne det a Bafom sus la testa dauria,

Tota la li trenquet e lo cors li debria,

E pueys can o ac fayt, envas luy s' umelia.


Dans son désespoir il ordonne un nouvel assaut. Les assiégés font d' autant meilleure contenance que Floripar leur a montré et fait toucher la couronne d' épines et les clous sacrés. Cependant l' assaut devient terrible, et les machines renversent un pan de muraille de la tour. Dans cette extrémité


Rollan et Olivier et Augier s' en intra;

En una cambra vengro on Tervagan esta;

Cascus pres un dieu d' aur, a son col lo cargua.

Rollan tenc Apoli, de lansar s' ayzina,

Jos en la prieysa maior als payas lo lansa;

Et Augier tenc Margot, aval lo balansa;

Olivier tenc Lupi, contraval l' evia;

Duc N Aymes de Bavier Bafom lor balansa.


Les païens effrayés reculent, et l' assaut est suspendu. Toutefois un démon ranime le courage abattu de l' émir, qui revient à la charge et presse si vivement les Français qu' ils sont près de succomber. En ce moment


Dux N Aymes esgardet lay vas una encontrada;

La senha Sant Denis a mot ben avizada...

“Senhors, so dis le duc, franca gen honorada,

Tota nostra dolor es hueymay espassada...” 


Les Sarrasins, instruits de l' approche des Français, se préparent à les recevoir. Avant de livrer bataille, Charles fait proposer à Balan de se faire chrétien, sur son refus, le combat s' engage:


La batalha fo grans, longamens a durat;

Ja foran li Frances malamen mescabat,

Si no fossen li comte, cuy Dieu done santat.

Ab tant veus nostres comtes de la tor avalatz,

Aval dins los estables an lors cavals trobatz;

Cascus a pres le sieu, mantenent so montatz,

E prendo lors escutz e lors espieutz cayratz.

Floripar la corteza a en aut escridat:

“Senhors, Jesus vos guit, lo rey de majestat!”

Li baro s'en anero punhen tuh abrivat;

De grans colps a ferir so ben entalentat...

Paya fuio Rollan, can l' an ben azesmat;

Los colps de Durandart los an espaventatz.

Paya son descofit e tuh desbaratat...

L' almiran vic sos homes fugir totz descofitz...

Tenc l' espaza el punh, e fo pros et ardis.

Amont, per mieg son elme, fier Hugo de Paris,

Entro sus a las dens fo fendutz e partis.

Apres a mort Jaufre, En Jaques de Santlis,

En Gari d' Albafort, Folcaut de Sant Denis.

L' emperaire o vic; mot mal fo talentis...

De Joyoza lo fier Karles, rey de Paris.

No 'l poc entamenar l' elme, tan fo masis; 

Sus en l' arso denan dichen lo bran forbis,

En doas partz li a son destrier mieg partit.

L' almiran chay a terra, mas tost es sus salitz;

Per desotz l' emperayre a son caval aucit,

E lo rey salh en pes cum vasal afortitz.

Karle e l' almiran son abduy avalatz,

Ab lors brans aceyratz si son ben encontratz.

L' almiran fo pus grans que Karle un palmat.

Los escuts d' ambedos son rotz e detrencatz;

En V locxs de la carn es nostre rey plagatz.

Enpero l' emperayre no l' a ges refudat,

C'un colp li a donat sus en l' elme vergat,

Las peyras e las flors en cazo per lo prat;

Mas la cofa fo fortz; no l' a entamenat;

E lo bran escalampa que pus bas a tocat.

L' espero li a prop del talo redonhat.

“Paya, dis l' emperayre, mot mas huey trebalhat; 

Mas si Bafom avias per Jesus delaychat,

Per amor de to filh ti rendray l' eretat.”

Can l' almiran l' enten, tot lo sen a mudat;

Ab pauc no a ab dens l' emperayre mangat...

Gran colp dona a Karle sus son elme gemat.

Lo bran dichen a terra per mot rusta fertat;

A terra s'es ficatz pus d' un pe mezurat; 

Al relevar que fetz lo bran a pesseyat.

Can l' almiran o vic, mot n' ac lo cor irat;

La targua que portava lanset e mieg del prat.


Il saisit Charles et l' aurait étouffé si Roland, Olivier et d' autres chevaliers ne s' étaient avancés, et n' avaient pris et désarmé l' émir. Cette circonstance décide la bataille en faveur des Français. Les Sarrasins, voyant leur chef prisonnier, fuient de toutes parts, et Charles entre dans Agremoine. Le lendemain il renouvelle à Balan la proposition de se faire chrétien, mais ni les menaces de l' empereur ni les prières de Fierabras ne peuvent rien sur ce cœur endurci. Alors 


Floripar escridet: “Karle, que demoratz?

El es us vers diable, tantost lo deslivratz;

A mi no cal si mor, mas En Gui mi donatz.”

- “Bela, dis Ferabras, vos avetz tort, si us platz;

Ja es el nostre payre e nos a engenratz;...

Ieu volria aver de mos membres talhatz

Per so qu'el fos en fons lavatz e bateyatz...”

- “Senher payre, dis ela, per que no us bateyatz?

Car ges no val Bafom II deniers monedatz;

Mas cel es veray Senher qu'en la crotz fo levatz,

Si 'n luy avetz fizansa, bon gueren vos n' agratz.”

- “Vay, dis el, putanela, laycha m' estar en patz!

Ieu no creyray Jesu, qu' el non a potestatz.

Pasat a V C ans que fo crucificatz. (500 años de la hégira?)

Mal aia qui 'l creyra que sia resussitatz.”

Can Ferabras l' auzic, dolens fo et iratz.

“A Karle! mon bel senher, faytz ne so que us vulhatz.”


L' émir est mis à mort. Floripar reçoit le baptême et s' unit à Gui de Bourgogne. Le royaume d' Espagne est partagé entre Fierabras et son beau-frère; Floripar, de son côté, remet à Charles la couronne d' épines et les autres reliques dont elle était dépositaire. La nuit suivante, l' empereur eut un songe qui s' expliqua dans la suite par la trahison de Ganelon, pendant une autre expédition. Tout étant terminé, Charles et son armée reprennent le chemin de la France.

Tan van per lor jornadas tro foro a Paris.

Cascus s' en vay avan lay on era noyris,

E Karle s' en anet al mostier Sant Denis;

Las reliquias lor mostra del rey de Paradis.

X avesques lay ac e d' abatz XXXVI.

E IIII arsivesques; de nobles e gentils

Lo barnatge lay fo d' Orles tro a Santlis.

Al baro Sant Denis fo fayta l' asemblada;

Aqui fo la corona partida e lauzada;

Una partida 'n fo a Sant Denis donada,

Us clavel atretal, so es vertat provada;

A Compienha lo signe a la glieyza onrada.

De las santas reliquias fo fayta devisada;

Bel present ne fe Karle per Fransa la lauzada.

A la honor de Dieu n' es manta glieyza honrada.

La festa de Santlis fo per ayso trobada.

No triguet mas III ans qu' Espanha fo gastada.

Lay fo la trassio dels XII Pars parlada;

Gaynes los ne vendet a la gen desfezada,

Don pueys fo ab rosis vilmen la carn tirada.

Lo somi s' averet, mala fos l' encontrada.

Ja tracher luenh ni pres no deu aver durada.

Bon' es d' aquest romans la fi e l' encontrada

E 'l mieg loc e per tot, qui be l' a escoutada.

A Dieu nos coman totz. Ma canso es finada.


Què vol Hitler ?

¿Què vol Hitler?  ¿ Qué quiere Hitler?  El estrecho vínculo entre el nazismo y el nacionalismo catalán Es bien sabido, gracias entre otr...